Éric Petr est un artiste-photographe français, né en 1961. Il vit à Marseille et promène son appareil photo, en toute discrétion, en des lieux publics et sacrés. Ses photographies éblouissent, émerveillent par leur beauté, le jeune enfant ; elles subjuguent, étonnent l’admirateur averti. Éric Petr, à 7 ans, était un précoce et talentueux « déclencheur ». Cet auteur est resté sans maître et humble. Ses photos, variations de lumière, résument ce qu’est la vie : fragilité et grandeur.
Ma photographie est une réflexion sur l’essence de la lumière. Elle questionne sur ce que l’observation imposerait certaines limites à notre perception du réel. Elle montre la fragilité et la beauté de la vie.
Pourquoi avoir choisi la photographie ?
Je ne l’ai pas choisie, elle s’est imposée à moi comme si dans ma mémoire subconsciente quelque chose m’avait toujours relié à elle. Quand je regarde dans l’œil de mon reflex, une distance avec le monde se produit et cette distance est celle qui me donne le recul nécessaire pour me sentir en phase avec ce monde. Depuis que j’ai regardé, tout jeune, à travers le viseur du 6×9 que m’avait prêté mon père, j’ai été fasciné par cette ambiguïté éprouvée à être tour à tour observateur et acteur de son observation. La photographie est pour moi le moyen de libérer une écriture inconsciente, dominée par une pulsion instinctive, l’inspiration.
Comment êtes-vous arrivé à ce type d’images ?
C’est un long parcours mais, quand j’y pense finalement, tout est assez cohérent. J’ai toujours eu le désir d’écrire la trace invisible de l’interconnexion des éléments de l’univers et la relation qui nous lie avec eux.
Avec quel matériel travaillez-vous ? Pourriez-vous expliquer votre technique ?
Je travaille essentiellement avec un Nikon F3 et un Nikon Df donc, avec l’argentique et le numérique. Je n’utilise jamais de zoom pour préférer les vieux objectifs qui ont une âme et avec lesquels je ressens une belle énergie. Je n’utilise pas de programme, je suis toujours en mode B (Bulb) et je n’utilise jamais le mode de mise au point automatique. La sophistication des appareils modernes me gêne et m’ennuie plutôt qu’autre chose. J’ai un peu l’impression, lorsque je me retrouve avec de vrais photographes, de faire partie d’un monde qui n’existe plus. Mais dans un sens, comme mes photos parlent d’intemporalité, ça leur va bien.
Vos séries sont-elles réfléchies avant la prise de vue ? Si oui comment naissent-elles ? Si non, comment naît la série ?
Dans mon esprit, mon négatif est la toile du peintre et la lumière, son pinceau. Dans la problématique posée, le rai de lumière est fixe ; c’est l’appareil qui doit être mobile. Comme si le peintre devait bouger sa toile pour peindre avec un pinceau fixé au mur. C’est ainsi que je photographie.
Je vais donc composer mes couleurs, dessiner mes formes, mettre en vibration des lueurs que j’extrais de lieux éternels et chargés d’une énergie particulière, pour écrire des histoires célestes de ce pinceau de lumière. La question que je pose ici : qui tient ce pinceau ? Ne serait-ce pas celui qui se trouve derrière la lumière, justement ? Cette connaissance qui précède la lumière ? Cet espace qui voit ce que voit la lumière ? Cet instant qui précède le Big Bang ? Ce trou noir qui renferme les secrets de l’univers et qui nous sont délivrés, sous la forme d’une écriture codée et poétique, sur ma pellicule ?
Mes séries sont toutes issues de cette même réflexion : la représentation de corps célestes, invisibles dans notre système en, seulement, trois dimensions. Chaque série montre une dimension différente de ces corps. Pour mieux comprendre, imaginons un volume suspendu dans l’espace. Imaginons également que nous projetions une source de lumière sur ce corps. Nous obtiendrions alors des formes réfléchies par la lumière, sur un mur opposé, de différentes structures, selon que la source d’éclairage est d’un côté ou de l’autre du volume. Les différentes images projetées de ce corps donneront une lecture multiple de ce qu’il est réellement. Pour autant, aucune des formes projetées ne sera inexacte, ni même exacte. C’est uniquement la multiplicité en série de ces formes projetées qui apportera une définition plus précise des caractéristiques du volume éclairé. Mes séries fonctionnent comme ces projections. Chaque série montrera une seule dimension de l’univers mais l’ensemble de mes séries apportera autant de facettes que l’univers a de dimensions.
Qu’est-ce qu’une photographie réussie ?
Une photographie réussie est une photographie qui traversera les temps sans jamais livrer son mystère. C’est son intemporalité qui fera d’elle son éternelle contemporanéité.
Qu’aimeriez-vous photographier que vous n’avez pas encore fait ?
Mon rêve serait de photographier ce qui précède le Big Bang, juste pour me rassurer et me dire que notre univers n’est qu’une fraction d’étincelle dans un monde perpétuellement en mouvement et non pas un monde figé dans une parenthèse, un monde sans père.
Que vous inspire le figuratif ?
Le figuratif fixe les éléments. Il nous assure que nous sommes. Il nous rassure au sens que ce que nous pouvons voir, est. Il crée une image figée de notre présent. Cette image prend une dimension atemporelle à travers laquelle notre esprit peut voyager dans l’espace-temps de notre imaginaire.
Éric Petr is a French photographer born in 1961. He lives in Marseille and, very discreetly, walks around with his camera into public and sacred places. His photographs dazzle, amaze young children through their beauty. They subjugate, astonish mature viewers. Éric Petr, at seven years old, was a precocious and talented « shooter ». Humble and belonging to no one, his photos, variations of light, summarize what life is: fragility and greatness. …
I didn’t choose it. It imposed itself on me as if something in my subconscious memory was always connected to it. When I look into the eye of my camera, a distance from the world is created, and this distance is what gives me the necessary space to feel in sync with this world. Ever since I looked though the viewfinder of the 6×9 my father lent me at a very young age, I was fascinated by this alternating ambiguity between being an observer and an actor in the observation. For me, photography is the way to free something unconscious, dominated by an instinctive drive, inspiration.
How did you end up making these types of photos?
It was a long journey, but, in the end, when I think about it, everything is pretty consistant. I always had the desire to draw out the invisible record of the interconnection of universal elements and the relationship that connects us to them.
What would you like to photograph you haven’t yet?
My dream would be to photograph what came before the Big Bang, just to reassure myself and tell that our universe is only a fraction of a spark of a world in perpetual movement, not a world frozen between parentheses, a world without a father.
What influences the figurative for you?
The figurative stabilizes the elements. It assures us that we are. It reassures us in the sense that we can see, is. It creates an image frozen in our present. This image take an atemporal dimension through which our minds can travel in the spacetime of our imagination.
Une écriture-silence, sans le bruit de la plume qui court sur le papier ou le son des touches qui s’enfoncent sur le clavier . Une écriture de lumières, sans alphabet ni forme dessinée. Une écriture première, mais non primitive. Une énergie qui traverserait la nuit d’un jet de lumière. Une trace irréfutable de vie. Voilà les premières sensations que l’on peut éprouver en regardant le travail d’ Eric Petr. Ainsi, la Création n’aurait pas un sens dicté par la forme. Elle ne serait ni l’œuvre de quelqu’un, ni la raison d’être. Elle n’aurait ni verbe ni chronologie. Elle serait trace lumineuse d’un instant présent qui se refuserait à l’oubli. Il se dégage de la lecture (et relecture) de ce travail une incroyable paix à voir l’équilibre entre ombres et lumières se succéder au fil des pages comme autant de fenêtres sur « les mondes ». Alceste Louleux
Elles sont la captation d’énergies ressenties dans des lieux chargés d’histoire et de mémoire. Une écoute de l’univers qui fait surgir de l’obscurité des corps revenus des tréfonds du monde sous l’apparition de formes gazeuses suspendues dans l’espace-temps aux éthers mystérieux et incantatoires.